Login

Pac post-2027 : une possible révolution des aides de base au revenu

La Commission européenne propose de renforcer la vocation sociale de l'aide de base au revenu, en ciblant davantage les agriculteurs dont la situation le justifie sur la base de critères socio-économiques.

Dans sa proposition de réforme de la Pac, la Commission européenne souhaite renforcer la dimension sociale des aides de base au revenu. Elle secoue donc la philosophie même du soutien au revenu agricole, en ciblant davantage les agriculteurs dont la situation le justifie.

Vous devez vous inscrire pour consulter librement tous les articles.

La Commission européenne a publié l’été dernier son projet de règlement détaillant l’architecture proposée pour la Pac post-2027, qui selon le commissaire à l’Agriculture, Christophe Hansen, « sera plus simple, plus ciblée et plus efficace, tout en conservant le soutien essentiel dont dépendent nos agriculteurs ».

Dans une analyse détaillée, l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri, un cercle de réflexion indépendant) développe tous les enjeux majeurs soulevés par cette réforme (baisse potentielle du budget pré-alloué à l’agriculture, refonte de la gouvernance, nouvelle architecture verte…), avec un point d’attention consacré à la réforme des aides au revenu. Cette dernière introduit une dégressivité obligatoire et vise un meilleur ciblage socio-économique des agriculteurs.

D’une Pac des hectares à une Pac sociale

Depuis les réformes McSharry (1992) et Fischler (2003), la Pac est passée d’un soutien des prix à une politique d’aide directe au revenu, rappelle le cercle de réflexion. Ces paiements représentent aujourd’hui près des trois quarts du budget agricole européen. Jusqu’à présent, la principale aide de base était calculée sur le nombre d’hectares détenus ou exploités, sans considération particulière pour la situation économique ou sociale des bénéficiaires.

La nouvelle architecture proposée pour la période qui s'étend de 2028 à 2034 veut rompre avec ce modèle. La Commission envisage de fusionner les trois principaux instruments actuels — l’aide de base, l’aide redistributive et l’aide complémentaire pour les jeunes — en un outil unique : une aide au revenu dégressive fondée sur la surface, mais modulée selon la situation socio-économique des exploitants. Elle propose de renforcer la dimension sociale de cette mesure en ciblant davantage les agriculteurs dont la situation le justifie — soit en raison d’un faible revenu agricole, soit parce qu’ils appartiennent à certaines catégories prioritaires : jeunes agriculteurs, nouveaux entrants, femmes, exploitations familiales, petites fermes, polyculteurs-éleveurs, ou encore exploitations situées dans des zones à contraintes particulières.

Ses propositions reposent sur trois grands axes :

  1. Une aide au revenu dégressive harmonisée, dont la moyenne nationale se situerait entre 130 et 240 euros par hectare. Le montant exact dépendrait de la situation économique de chaque agriculteur. Cette mesure supprimerait les anciens « droits à paiement de base », mettant fin aux interminables débats sur la convergence des aides entre États membres.
  2. La prise en compte des actifs agricoles, et non plus seulement de la surface. Les aides seraient donc partiellement calculées sur le revenu agricole, orientées vers ceux qui contribuent réellement à la production alimentaire, et excluraient progressivement les exploitants retraités d’ici à 2032. Les États membres pourraient aussi opter pour des paiements forfaitaires annuels.
  3. Une limitation des montants perçus, avec une dégressivité dès 20 000 euros et un plafonnement obligatoire à 100 000 euros par bénéficiaire. Cette mesure viserait à réduire les écarts entre très grandes et petites exploitations, tout en améliorant l’acceptabilité sociale du dispositif.

Une idée pas tout à fait nouvelle

Pour l’Iddri, cette réforme représente l’un des quatre enjeux majeurs du futur de la Pac, aux côtés de l’architecture verte, de la gestion des crises et de la gouvernance par la performance. Mais le think-tank reste prudent : plusieurs des mesures annoncées ont déjà été envisagées par la Commission lors de précédentes réformes de la Pac, sans jamais aboutir. C’est le cas du caractère obligatoire pour les États membres du plafonnement et de la dégressivité, rappelle l’Iddri. « Cette nouvelle proposition de réforme des aides de base fera donc à n’en pas douter l’objet d’intenses débats au sein du Conseil de l'agriculture et de la pêche, du Parlement et peut-être même du Conseil européen », conclut le think-tank.

A découvrir également

Voir la version complète
Gérer mon consentement